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  • El ejército del Rey Sol huye de Barcelona bajo un eclipse solar tremendo, pactando con los migueletes en el camino

    Après cela il fallut délibérer de la manière de l’exécuter et du lieu où l’armée se tourneroit. On convint encore qu’il n’y avoit nul moyen de se retirer par la Catalogne, pleine de révoltés qui tenoient la campagne, soutenus de tous ceux du royaume de Valence qui tenoient les places, et à travers cette cruelle multitude de miquelets qui les assiégeoient. Il fut donc résolu qu’on prendroit le chemin de la frontière de France, et que là, on délibéreroit de nouveau, quand on seroit en sûreté vers le Roussillon, de ce qu’on deviendroit.

    On leva donc le siège la nuit du 10 au 11 mai, après quatorze jours de tranchée ouverte, et on abandonna cent pièces d’artillerie, cent cinquante milliers de poudre, trente mille sacs de farine, vingt mille de sevade[1], quinze mille de grain, et un grand nombre de bombes, de boulets et d’outils. L’armée fut huit jours durant harcelée par les miquelets en queue et en flanc de montagne en montagne. Le duc de Noailles, dont l’équipage avoit été constamment respecté par eux pendant le siège et dans cette retraite, parce qu’ils aimoient son père pour les avoir bien traités et avoir sauvé la vie à un de leurs principaux chefs, s’avisa de les appeler pour leur parler. À son nom, les principaux descendirent des montagnes et vinrent à lui. Il en obtint qu’ils n’inquiéteroient plus l’armée, qu’ils ne tireroient plus sur les troupes, à condition qu’on ne les brûleroit point. Cela fut exécuté fidèlement de part et d’autre, et de ce moment l’armée acheva sa marche en tranquillité, qui fut encore de trois jours, où elle auroit beaucoup souffert de ces cruelles guêpes.

    L’armée n’en pouvoit plus ; elle perdit presque tous ses traîneurs et tous les maraudeurs dans cette retraite, en sorte qu’avec le siège il en coûta bien quatre mille hommes. Sa volonté néanmoins fut toujours si grande, que, malgré tant d’obstacles, elle auroit pris Barcelone, sans ceux de notre artillerie et de nos ingénieurs.

    Arrivés à la tour de Montgris, il fut question de ce que deviendroit le roi d’Espagne. Quelques-uns vouloient qu’il attendît en France le dénouement d’une si fâcheuse affaire, et d’autres que, se trouvant dans cette nécessité, il poussât jusqu’à Versailles. Le duc de Noailles, à ce qu’il m’a dit, et que je ne garantis pas, ouvrit un avis tout contraire, et qui fut le salut du roi d’Espagne : il soutint que cette retraite en France, ou ce voyage à la cour perdroit un temps précieux, et seroit sinistrement interprété ; que les ennemis des deux couronnes le prendroient pour une abdication, et ce qui en Espagne restoit affectionné, pour un manque de courage et pour un abandon d’eux et de soi-même : que, quelque peu de suite, de moyens, de ressources qu’il restât au roi d’Espagne, il devoit percer par les montagnes du pays de Foix droit à Fontarabie, de là joindre à tous risques la reine et son parti, se présenter à ses peuples, tenter cette voie unique pour réchauffer leur courage, leur fidélité, leur zèle, faire des troupes de tout, pénétrer en Espagne, et jusque dans Madrid, sans quoi il n’y avoit plus d’espérance par les efforts que les ennemis alloient faire pour s’établir par toute l’Espagne et dans la capitale même.

    La résolution en fut heureusement prise. L’armée s’arrêta en Roussillon ; et tandis que le roi d’Espagne s’en alla à Toulouse et par le pays de Foix gagner Pau, puis Fontarabie, avec deux régiments de dragons pour son escorte, quelques grands d’Espagne qu’il avoit avec lui, et le duc de Noailles qui voulut l’accompagner jusqu’à Fontarabie, le marquis de Brancas fut dépêché au roi pour lui rendre compte de tout, recevoir ses ordres, et les porter à Pau au roi d’Espagne. Brancas arriva le 28 mai à Versailles, sur le soir, et vit en arrivant le roi chez Mme de Maintenon, où Chamillart le mena.